Le salon ALpipro digital Mountain, qui s’est tenu les 26 et 27 avril au parc des expositions Savoiexpo à Chambéry, a triomphalement clôturé une saison d’hiver pourtant mitigée.
Positionné en fin de saison, quand les vacanciers ont à peine déchaussé leurs skis et que certaines remontées mécaniques tournent encore, Alpipro Digital Mountain s’inscrit habilement dans la temporalité professionnelle du secteur. Son record de fréquentation et son programme de conférences attestent de son caractère rassembleur et confraternel. Un point que le salon a bien saisi en ouvrant son cycle de conférences sur un bilan de saison. Intitulée « On a eu chaud cet hiver », cette table ronde, qui a rassemblé les principaux acteurs du tourisme de montagne, a logiquement débuté par un retour sur la météo hivernale, qui a tenu le secteur en haleine.
Une météo en dents de scie.
« Nous avons connu trois phases cet hiver : la première très douce et pluvieuse en décembre, défavorable à l’enneigement en base altitude, décrit Denis Roy, responsable du centre de montagne des Alpes à Météo France. Puis, une séquence froide en janvier, suivie d’une période anticyclonique exceptionnelle aux mois de février et mars, qui a battu le record du nombre de jours sans pluie en hiver, précédemment détenu par l’année 2011. » Si les températures de janvier ont permis de produire de la neige de culture, la douceur de février a détérioré l’enneigement, déjà assez faible.
« Les hauteurs de neige ont retrouvé des valeurs proches de la normale, voire excédentaires, en fin de saison. »
Des aléas météorologiques qui ont pu impacter la fréquentation : « Nous avons deux lectures sur cet hiver, analyse Laurent Cormier, directeur général d’Auvergne-Rhône-Alpes Tourisme. Sur l’ensemble de la saison, notre partenaire G2A enregistre une hausse de 9 % du taux d’occupation des lits marchands. Mais quand nous regardons l’ensemble de la fréquentation touristique en montagne cet hiver, nous remarquons un net recul de la clientèle française et un élan vers le secteur touristique non marchand. » « Le contexte inflationniste » et « les problématiques de répartition des zones scolaires » pourraient expliquer ces résultats contrastés.
Mars et avril à conquérir.
Le focus sur les vacances de printemps montre que la fin de saison reste à conquérir : « mars et avril : -6 % », annonce sobrement Laurent Cormier. « Les taux de fréquentation ont chuté sur toutes les semaines dès la fin des vacances de février. Compte tenu des efforts entrepris sur cette période, c’est à prendre en considération. »
Le secteur touristique peut tout de même se féliciter du retour en masse de la clientèle britannique : « Plus de 40 % par rapport à la saison précédente. Les Anglais restent la première clientèle étrangère de nos stations ». La clientèle hollandaise, venue « par défaut » l’année dernière suite à la fermeture des stations suisses, enregistre une croissance de 9 %. « Nous notons aussi un retour inédit des Allemands : de + 15 à + 17 % d’augmentation ».
Du côté des Écoles du ski français, Éric Brèche, le président du syndicat qui représente les moniteurs, a constaté un besoin d’anticipation de leur clientèle, qui s’est traduit par « une augmentation de 10 % des réservations en ligne ». Ces réservations se sont néanmoins concentrées sur certaines périodes, ce qui n’a pas empêché l’ESF, dans sa globalité, d’accroître son chiffre d’affaires d’environ 7 %.
L’hiver le moins enneigé des 40 dernières années.
« Cela fait plusieurs saisons qu’on soumet la montagne à des tests d’effort violents », illustre Laurent Reynaud, listant tout de go les fermetures des remontées, les limitations de voyages, la hausse du prix de l’énergie et le manque de neige. « Cet hiver a été le moins enneigé de ces quarante dernières années ». Un contexte qui fragilise les stations de basse altitude, déjà en proie à des difficultés structurelles, rappelle le délégué général de Domaines skiables de France. « Cela remet en question l’activité sur ces territoires, mais aussi la filière, car ces stations sont des pépinières de skieurs ». La fréquentation des domaines skiables est en recul de 4 % par rapport à l’année dernière ; elle s’inscrit dans la moyenne des quatre dernières années. Pourtant, le chiffre d’affaires des remontées mécaniques est en hausse : « Malgré le manque de neige, les stations ont été capables de proposer du ski et ce produit a plu ».
Le bilan du salon : Avant même d’avoir ouvert ses portes, le salon avait démarré sur le succès de son Éductour, qui se tenait la veille dans la station des Saisies, en Savoie. « Pour être un salon national, il faut faire venir des personnes de toute la France. Inviter les stations des Vosges, du Jura, des Hautes-Alpes et des Pyrénées est donc important pour nous. Nous leur permettons de s’immerger dans un modèle différent du leur », affirmait Pascal Barcella, le président de Savoiexpo. Une quinzaine de participants étaient présents : « C’est une totale réussite pour cette première, qui nous encourage à rééditer l’Éductour en 2025, en montant en puissance », commente Stéphane Fages, le directeur général de Savoiexpo. En outre, dans les halls de Savoiexpo, 200 exposants avaient répondu à l’appel. « Cette édition a permis de valider le positionnement du salon sur cette période : il est au bon endroit, au bon moment », rappelle Stéphane Fages. « Avec 4 150 visites sur deux jours, Alpipro Digital Montagne 2023 est un franc succès (+12 % par rapport à 2021). » L’organisateur met également en avant l’affluence sur la quasi-totalité des tables rondes des Assises – Mountain Next. « Le programme était riche : plus de 60 intervenants, de qualité, sur les deux jours. Les acteurs majeurs de la montagne ont pu s’exprimer, travailler sur des logiques de bilan, mais aussi sur des logiques de projection et d’échanges. »