Du hasard dans les marchés publics

Dans le cadre d’un appel d’offres, une méthode de notation du critère prix reposant sur le hasard ne constitue pas un manquement aux obligations de mise en concurrence.

C’est ce qu’a précisé le Conseil d’Etat dans une décision du 16 novembre dernier, quant aux modalités d’évaluation du critère prix.
En l’espèce, la Ville de Marseille avait lancé une procédure formalisée d’appel d’offres pour l’attribution de marché de travaux ayant pour objet l’exploitation et le maintien de ses installations d’éclairage public.
Pour deux des quatre postes de prestation, le pouvoir adjudicateur avait choisi de noter le critère prix en multipliant les prix unitaires fournis par les candidats par le nombre d’interventions envisagées. Il en résultait un ensemble de commandes fictives, placées sous pli cacheté, dont l’une d’entre elles devait être tirée au sort et permettre de confronter les offres de prix.
Saisi sur le fondement de l’article L. 551-1 du Code de justice administrative par une société candidate au marché, le Tribunal administratif de Marseille avait annulé l’ensemble de la procédure de passation, ainsi que la décision d’attribution du marché aux motifs que « l’introduction du hasard dans la procédure de désignation du bénéficiaire du marché en litige […] avait nécessairement privé de leur portée les critères de sélection ou neutralisé leur pondération et induit, de ce fait, que la meilleure note ne soit pas nécessairement attribuée à la meilleure offre, ou, au regard de l’ensemble des critères pondérés que l’offre économiquement la plus avantageuse ne soit pas choisie, dès lors que le choix de l’attributaire ne résulte pas de l’analyse conduite par le pouvoir adjudicateur mais des résultats d’un tirage au sort aléatoire ».
Saisi, le Conseil d’État annule pour erreur de droit l’ordonnance attaquée. Rappelant que la méthode de notation des critères de sélection des offres est librement définie par le pouvoir adjudicateur, le juge estime qu’en se livrant aux simulations reprochées, la ville n’a pas eu recours à un sous-critère, mais a simplement exercé la liberté dont elle dispose pour établir la méthode du critère prix. Elle n’est donc pas tenue d’informer les candidats, dans les documents de la consultation, du recours à une telle méthode.
Trois conditions sont toutefois essentielles pour avoir recours à ces commandes « fictives »
– les simulations effectuées doivent toutes correspondre à l’objet du marché ;
– le choix du contenu de la simulation ne doit pas avoir pour effet d’en privilégier un aspect particulier, de telle sorte que le critère prix s’en trouverait dénaturé ;
– le montant des offres proposées par chaque candidat doit être reconstitué en recourant à la même simulation.

(CE, 16 novembre 2016, Société SNEF)