Annoncé en grande pompe le 27 mai dernier après un hiver sans remontées mécaniques, le plan « Avenir Montagnes » ambitionne de donner les moyens aux territoires de montagne de s’adapter à un tourisme à la fois plus durable et quatre saisons. En somme, bâtir un futur pluriel.
Au cœur d’un hiver si singulier qui voyait les Français prendre d’assaut la montagne et ses grands espaces, alors que les exploitants de domaine skiable étaient contraints de rester à l’arrêt, le gouvernement, par la voix du Premier ministre Jean Castex, annonçait la construction d’un plan montagne. Après des mois de concertation avec les acteurs de la montagne dans tous les massifs, le plan « Avenir Montagnes » a été présenté le 27 mai en Savoie. Un moment fort de l’histoire de la montagne, à l’image du plan Neige de 1964 ou de la loi Montagne de 1983. « Avec le plan ‘‘Avenir Montagnes’’, l’État porte une ambition forte : construire un modèle touristique à la fois plus diversifié et plus durable pour les territoires de montagne, en lien étroit avec ses principaux acteurs, dont les collectivités territoriales, et ce, tout au long de l’année », posait Jean Castex, en préambule des annonces.
Des millions et trois grands axes
Pour faire vivre les territoires de montagne de façon plurielle et sur le temps long, en fonction des spécificités de chaque massif et chaque vallée, l’État va mobiliser une enveloppe de 643 M€ de crédits publics, générant près de 1,8 Md€ d’investissement dans ces territoires. « Ce plan dégage un horizon clair : relancer l’investissement au service d’un objectif de transformation », assurait le Premier ministre.
Un plan bâti autour de 14 mesures clés réparties sur trois axes principaux : favoriser la diversification de l’offre et la conquête de nouvelles clientèles, accélérer la transition écologique des activités touristiques de montagne ainsi que dynamiser l’immobilier de loisir et enrayer la formation de lits froids. Des thèmes qui regroupent les grands enjeux de l’avenir touristique en zone de montagne, bien que parfois utilisés à tort et à travers. En l’absence d’une politique publique en matière de tourisme, les millions mobilisés devront permettre de répondre le plus rapidement possible aux besoins des territoires.
Les détails financiers
Avec d’un côté, le fonds « Avenir Montagnes » doté de 331 millions d’euros (voir graphique page 96) comprenant un volet de soutien à l’investissement de 300 millions d’euros, cofinancés avec six régions, visant l’émergence de projets touristiques en lien avec les trois axes du plan, et un volet d’accompagnement de 31 millions d’euros consacré à l’accompagnement en ingénierie des territoires qui en ont besoin. Et de l’autre, des mesures pour accélérer la rénovation globale et l’occupation de l’immobilier de loisir en station pour lutter contre la problématique des lits froids. La Banque des territoires investira 125 millions d’euros sur cinq ans dans des foncières, aux côtés d’autres investisseurs. Le plan comprend également un volet sur la transition écologique des activités touristiques en montagne avec l’aménagement de 1 000 km de sentiers (10 M€ d’investissement) et la mise en place d’un accompagnement en ingénierie pour améliorer la mobilité des premiers et derniers kilomètres (doté de 10M€), à l’image des ascenseurs valléens. Ces derniers sont aujourd’hui au cœur de l’attention des pouvoirs publics pour assurer une mobilité plus douce vers les domaines skiables. Cette nouvelle enveloppe devrait encore accélérer le développement des projets.
L’application sur le terrain
Dans une circulaire du 15 juillet, le Premier ministre a précisé aux préfets, garants de la coordination de ce plan sur les territoires, les modalités d’utilisation du nouveau fonds Avenir montagnes et sa répartition massif par massif. Ainsi, après avoir recensé les territoires candidats, les projets à soutenir et assurer la concertation avec les acteurs locaux, les protocoles d’accord devront parvenir au ministère de la Cohésion des territoires au plus tard le 30 septembre 2021. Dans les Alpes par exemple, il incombe à Christophe Mirmand, préfet de la région Provence-Alpes-Côte d’Azur et préfet du massif des Alpes d’assurer la déclinaison du plan.
Et le ski dans tout cela ?
Moteur de l’économie touristique des destinations de montagne, le ski et ses 250 stations génèrent près de dix milliards d’euros de recettes et mobilisent 120 000 emplois. Si l’État a répondu présent avec plus de 5,4 milliards d’euros d’aides d’urgence, dont 630 millions pour l’indemnisation à hauteur de 49 % de leur chiffre d’affaires de référence, des questions restent en suspens, puisque le ski ne semble pas être au cœur des enjeux et des ciblages d’investissement. Alors que pour bon nombre d’élus et de responsables de domaine skiable, le ski va financer la diversification. « L’effet waouh est passé. Nous n’avons pas d’éléments précis. Aujourd’hui (fin août), rien ne permet de se dire que c’est un dispositif rapide, facile et pragmatique pour relancer l’investissement. Pour l’instant, ce n’est pas une réussite selon moi », analyse Alexandre Maulin, président de Domaines skiables de France. Les semaines à venir seront décisives à tous points de vue pour l’avenir du ski et de la montagne. À travers ce plan et le visage de l’hiver 2021-2022. Car les enjeux à court et long terme ont rarement été aussi imbriqués.
Découvrez ce dossier en intégralité dans l'édition n°286 de Montagne Leaders. Les autres articles du dossier : - Budget : les montants du plan « Avenir Montagnes » passés à la loupe - Christophe des Roseaux directeur des investissements Tourisme-Loisirs-Culture à la Banque des Territoires : « Il y a une prise de conscience sur la question des lits froids » - L’écosystème du ski dans l’incertitude - JOËL GIRAUD, secrétaire d'état chargé de la ruralité « Rendre possible la montagne de demain »