C’est la révolution dans le Jura. La station de Métabief a enclenché un virage à 180 degrés de son modèle économique, appuyé par l’étude climatique ClimSnow. Explications.
En 2017, Olivier Erard, directeur de la station de Métabief se pose une question : « Où va-t-on ? ». En effet, la station jurassienne a enchaîné les mauvais hivers et la dette a explosé suite aux investissements sur la maintenance du parc des remontées mécaniques qui date des années 80 (8 M€) et dans la neige de culture (8 M€). De plus, le réchauffement climatique ne laisse pas forcément présager un avenir radieux. Un renouvellement des installations est indispensable, mais il est impossible de financer les 14 millions d’euros nécessaires. « La neige de culture a sauvé la station. Sans cela, je pense qu’elle serait déjà fermée. Cependant, nous restions devant de trop nombreuses impasses : financière, climatique et environnementale avec la question des compensations liées aux travaux de neige de culture », expose l’actuel directeur du syndicat mixte du Mont d’Or, qui assure la gestion du domaine skiable de Métabief.
Une démarche proactive
Glaciologue de formation, il se penche alors sur le modèle climatique Drias qui permet d’effectuer des projections sur le climat. En complément des quatre années d’exploitation des enneigeurs, les conclusions apparaissent inévitables : en dessous de 1 000 mètres, les plages de froid sont peu fiables pour les années à venir. Le scan du parc de remontées mécaniques (6 télésièges pinces fixes et un débrayable) en 2018 avec la méthode Évaluation de la Vulnérabilité des Existants par Sarrasola, AIM et Miage va donner un coup d’accélérateur à la prise de décision. « L’analyse fine des appareils et de leur durée de vie nous a permis de passer d’un programme de 14 M€ à seulement 2 M€. Nous avions tous les éléments en main pour faire accepter aux élus la nécessité de changer de modèle. » Enfin, la présentation de Climsnow par Samuel Morin de Météo France lors du congrès DSF 2019 à Besançon emballe Olivier Érard qui y voit une opportunité supplémentaire d’aide à la transition touristique.
Du ski à l’outdoor
Dévoilée en août dernier, l’étude Climsnow donne une photo actuelle, confirme le virage enclenché et apporte de nouvelles indications. La neige de culture a sauvé la station et la fréquentation sur le VTT a été multipliée par trois en cinq ans, représentant 10 % du chiffre d’affaires. Ensuite, les approches statistiques et les simulations climatiques et d’enneigement montrent une garantie neige jusqu’en 2040. Ensuite le seuil de rentabilité économique sera dépassé. Il y aura toujours de bons hivers, mais de moins en moins. Ainsi, des petits investissements vite amortis sont encore possibles, mais la transition doit s’opérer dès à présent. « Il faut y aller maintenant. Nous devons structurer une offre diversifiée qui profite à tout le territoire. On a dix ans pour co-construire un projet afin que la palette de produits outdoor pallie un chiffre d’affaires ski alpin divisé par trois ou quatre », détaille celui qui est en charge de l’ingénierie de la nouvelle stratégie du SMMO. Entre l’axe outdoor et l’axe patrimonial, Olivier Erard se veut confiant quant à l’émergence d’un nouveau modèle touristique de moyenne montagne. Cette prise de conscience pourrait faire des émules au sein d’un milieu contraint de se renouveler pour survivre.
2030-2040 : période charnière « On arrête le ski à moins que la collectivité locale décide de continuer à payer deux millions d’euros par an sans le soutien du département». Devant ces éléments et le constat de l’étude Climsnow, les élus ont décidé de suivre les préconisations et d’engager un plan de territoire en dédiant 60 % de la taxe remontées mécaniques au financement du poste d’Olivier Érard qui doit développer les activités outdoor (VTT, trail, ...), des produits avec le Parc du Haut-Jura, ou encore un volet patrimonial.